Aller au contenu principal
Catégorie d'info

Réforme des rythmes scolaires : avant tout une histoire d'argent ?

Chapo
« Chacun cherche à obtenir à l'occasion de cette réforme des avantages financiers » a dit, jeudi 24 janvier, Vincent Peillon au micro de France Inter. Voici venu le temps de la culpabilisation.
Visuel
Image
Publié le
Corps

Donc, si la réforme des rythmes scolaires ne se déroule pas « en bonne intelligence », c’est parce que nous, professionnels de l’éducation, ne pensons égoïstement qu’à notre bien-être. Sur le moment, je me suis dit qu’il y avait erreur, que le ministre n’essayait pas hier à travers cette phrase de nous culpabiliser et de nous rappeler que dans le monde de l’éducation, il y a bien mieux que l’argent, il y a les bonnes idées et l’engagement et la conviction. Pourtant, il a ajouté dans la seconde suivante que « la question qui se pose est d'abord celle de faire [la réforme] dans l'intérêt des enfants. » Comme si aucun d’entre nous ne le savait et ne clamait son mécontentement, car justement le bien-être des enfants n’a jusqu’alors été qu’une vitrine.

Déjà, il est connu que l’animateur est vénal et que vous avez choisi ce secteur pour ses perspectives de carrière. De même, vous savez tous qu’en abaissant le taux d’encadrement des accueils périscolaires, il vous sera possible de mettre en œuvre des projets sensibles et créatifs en direction des jeunes élèves, parce que plus il y a d’enfants, plus simple est la tâche pédagogique… Bon, arrêtons-nous, parce qu’on pourrait croire qu’il y a ici du sarcasme.

Malgré tout, il est un point sur lequel j’approuve entièrement le ministre : il est temps de recentrer le débat, d’oser enfin parler des fondements de cette réforme des rythmes scolaires, c’est-à-dire de l’argent nécessaire à sa mise en place. Car disons-le franchement, le bien-être des enfants, seuls les personnels éducatifs s’en soucient et en parlent, tous ces invisibles qui n’ont pas été consultés et qui seront ceux qui mettront en œuvre cette grande « révolution ».

Un coût à la charge de...

Pourtant, même là le bât blesse, parce que ce n’est pas en créant un fonds de 250 millions d'euros pour venir en aide aux collectivités appliquant la réforme dès 2013 que tout va changer. Car soyons honnêtes, l'abaissement des taux d'encadrement des accueils périscolaires n'a été décidé que sur des considérations économiques, suite à la grogne des collectivités locales.

C’est ce qu'illustre la « fiche d’impact [de la réforme] sur les collectivités territoriales », établie par le ministère de l’Éducation nationale et présentée le 23 janvier à la Commission consultative d'évaluation des normes, réunie en urgence pour valider le projet de décret. On peut y lire que : « Le coût annuel par élève est rapporté à 130 € pour les élèves de maternelle nécessitant un taux d'encadrement d'1 adulte pour 14 enfants et à 101 € pour les élèves de primaire dont le taux d'encadrement est d'1 adulte pour 18 enfants. Sur la base d'une prise en charge de 2 heures par semaine, le coût annuel par élève s'établit respectivement à 86 € et 67 €. »

Avant de préciser que « l'assouplissement prévu des taux d'encadrement permet une diminution approximative du coût variant de 52 € à 35 € pour chaque élève de maternelle, et de 29 € à 19 € pour chaque élève de primaire » et un peu plus loin que « ces évaluations ne peuvent être transposées au niveau national dans la mesure où les modalités d'organisation locales seront très variables d'une commune à l'autre, pourront faire appel à des bénévoles (associations…) et pourront générer par ailleurs des coûts moindres (par exemple, suppression notamment des crèches et activités organisées le mercredi matin et subventionnées par la commune). »

 

 

Evaluation à partir des taux d'encadrement actuels

Evaluation à partir des taux d'encadrement assouplis

Evaluation à partir des taux d'encadrement actuels

Evaluation à partir des taux d'encadrement assouplis

 

Elèves de moins de 6 ans (maternelle)

Elèves de moins de 6 ans (maternelle)

Elèves de plus de 6 ans (élémentaire)

Elèves de plus de 6 ans (élémentaire)

Nombre d'élèves pour 1 personne encadrante

10

14

14

18

Coût horaire moyen pondéré d'1 personne encadrante

16,86€

16,86€

16,86€

16,86€

Coût horaire par élève

1,69€

1,2€

1,2€

0,94€

Coût hebdomadaire par élève

 

 

 

 

pour 3h/semaine

5,06€

3,61€

3,61€

2,81€

pour 2h/semaine

3,37€

2,41€

2,41€

1,87€

Coût annuel par élève

 

 

 

 

pour 3h/semaine

182,09€

130,06€

130,06€

101,16€

pour 2h/semaine

121,39€

86,71€

86,71€

67,44€

 

Il ne faut pas être fort en maths pour comprendre qu’en l’état, cette réforme s’annonce onéreuse pour les collectivités, les CAF et les contribuables. Que les disparités seront grandes d’une commune à l’autre et qu’on voit ici se dessiner une paupérisation de l’animation.

Alors, monsieur le Ministre, « soyons intelligents tous ensemble ! » et invitons les politiques à cesser de penser aux échéances électorales lorsqu’ils mettent en œuvre un projet de société… Cela éviterait que des révolutions éducatives ne se transforment en de simples bricolages d'emplois du temps, ne respectant ni le bien-être des enfants ni celui des professionnels.

Le cap fixé par l’amiral Peillon sera vraisemblablement suivi, quoiqu’il en coûte. Néanmoins agissons, et mobilisons-nous, nous les invisibles de la réforme, et signons la pétition "Monsieur Peillon, écoutez les professionnels de l'Animation et de l'Éducation populaire".

FC

Titre :
Réforme des rythmes scolaires : avant tout une histoire d'argent ?
Auteur :
Florent Contassot
Publication :
26 avril 2024
Source :
https://www.jdanimation.fr/node/596
Droits :
© Martin Média / Le Journal de l'Animation

Vous devez vous connecter pour laisser un commentaire.

©2023 Martin Média - Tous droits réservés 
Les contenus, vidéos, infographies et photographies de ce site ne peuvent être utilisés sans autorisation. 
Conception graphique et développement du site : Metropolitan Neo