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Bac pro AEPA : de la classe au terrain

Chapo

En juin prochain, seront diplômés les premiers Bac pro Animation enfance et personnes âgées (AEPA). Cette formation née en 2019 et dispensée sur trois ans est encore mal connue. Direction le terrain, au Lycée des métiers Saint-Vincent de Paul à Bordeaux, pour voir ce qu’il en est.

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Toutes photos © Florent Contassot
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« Les élèves prennent ce dont ils ont besoin dans l’armoire à fournitures mais ils ont la charge de signaler ce qu’il manque ou va manquer. Il est important qu’ils soient responsabilisés. » Agnès Befve, enseignante en animation au Lycée des métiers Saint-Vincent de Paul (Bordeaux), désigne le dos de la porte de la classe où est accrochée une trousse à pharmacie rouge. « L’acquisition des règles de sécurité est une composante essentielle du métier. Ils doivent également y être confrontés au quotidien. »

La salle de classe des Bac pro AEPA se veut professionnelle et à l’image du métier : on y trouve par exemple tout le matériel nécessaire à la préparation d’activités, « beaucoup de récup’ », et les dernières réalisations des élèves. « Ils travaillent autour des fêtes calendaires, Halloween ou Noël, voire de thématiques plus larges comme le développement durable ou les droits de l’enfant. » Sur le tableau blanc, à gauche de la porte, sont ainsi accrochés des autoportraits et des sacs à bonbons, semblables à des fantômes, orange et noirs. À droite, on découvre un nuage de mots en lien avec l’adolescence et mis en forme de manière très graphique.

Ce matin de décembre, les élèves préparent activement le Noël des enfants du personnel de l’établissement, accompagnés par leur enseignante en animation, Agnès Befve.

Sur une table, trônent des carnets de Noël, personnels et personnalisés, dans lesquels les élèves notent des chants, des recettes, des activités… en lien avec la période. « En seconde, nous sommes le plus concrets possible. Pendant les heures de techniques professionnelles, les élèves sont souvent invités à imaginer, concevoir et mettre en œuvre des activités de loisirs. »

Mise en situation

Ce matin, les tables sont disposées en îlots et les élèves poursuivent en groupes la préparation du Noël des enfants du personnel de l’établissement. L’événement a lieu dans deux jours, le mercredi après-midi précédant les congés de fin d’année. Aucun des jeunes ne reste inactif, le temps est compté. Il y a les pancartes des ateliers à préparer, des activités à peaufiner, les déguisements à vérifier… « Un père Noël est prévu et des lutins tous coiffés d’un bonnet ; c’est essentiel ! », remarque en souriant une élève.

Paragraphes

La formation AEPA en résumé

Depuis 2020, le Bac professionnel Animation Enfance Personnes âgées forme sur trois ans des animateurs professionnels capables de concevoir des projets et des activités d’animation auprès d’un public de jeunes ou de personnes âgées. Il comprend 22 semaines de stage en entreprise qui permettent de découvrir concrètement les structures, dans lesquelles travailleront les futurs diplômés, et les besoins des différents publics accueillis.

En région Aquitaine, 14 lycées privés et publics proposent cette formation. En France, on en dénombre 187.

La programmation pensée par les élèves est dense : chasse au trésor avec énigmes, maquillage, parcours de motricité avec obstacles, pêche aux cadeaux, chamboule-tout, etc. Du classique, peut-être, mais qu’ils ont imaginé et préparé collectivement et dont ils seront responsables le jour J. C’est là un véritable projet d’animation et un tableau, affiché à la vue de tous, récapitule le déroulé de l’après-midi, le rôle de chacun, les chefs d’équipe… Il mentionne aussi ceux qui occupent les fonctions de maître du temps, photographe, trésorier, etc. « Nous connaissons déjà le nombre d’enfants présents, et une pastille rouge sera collée à côté de leur prénom en cas d’allergie. » Tout est parfaitement planifié.

Le référentiel du Bac pro AEPA

L’arrêté du 22 juillet 2019 portant création de la spécialité « animation – enfance et personnes âgées » du baccalauréat professionnel est consultable sur Légifrance (https://bit.ly/JDA236AEPA). Dans les annexes I et II, se trouvent les référentiels des activités professionnelles et de compétences et d’évaluation.

Rester proche du terrain

Les élèves travaillent en autonomie sous le regard d’Agnès Befve. L’enseignante veille à ce que les fiches techniques d’activité soient bien remplies et au bon respect des règles d’orthographe et de grammaire. Sur chaque document, sont mentionnés les objectifs de l’activité, le matériel nécessaire à sa mise en place, le nombre d’encadrants, son déroulé, les critères d’évaluation… Ces fiches sont manuscrites ou complétées sur un traitement de texte via une tablette personnelle. Le Lycée des métiers Saint-Vincent de Paul est un établissement numérique : à son entrée en seconde, chaque élève est équipé d’une tablette numérique comprenant un pack de logiciels ; une partie de son coût (300 €) doit être remboursée sur trois ans par les familles.

La fête de Noël des enfants du personnel est le temps fort de la fin d’année, festif mais évalué. « Mercredi après-midi, tous les élèves seront badgés afin que les participants puissent éventuellement faire un retour sur la manière dont ils ont été accueillis, sur la clarté des explications… C’est important que les élèves comprennent la responsabilité qui est la leur et l’impact de leur comportement. »

D’autres mises en situation sont prévues pendant l’année, en lien avec des associations locales. Comme sont programmées des interventions de professionnels, une fois tous les deux mois environ. Ceux-ci viennent présenter aux élèves la structure dans laquelle ils travaillent et expliquer la réalité de leur métier. Le contexte, le futur environnement de travail, est décortiqué tout au long des trois années de formation. Les élèves découvrent les publics qui seront les leurs, les structures qui les accueillent… et tout l’aspect réglementaire qui leur est associé. Un très gros travail. Au lycée Saint-Vincent de Paul, on s’attache la première année au secteur de l’enfance et aux personnes âgées en perte d’autonomie, puis les années suivantes aux personnes en situation de précarité, aux seniors (de plus de 55 ans) mais aussi aux personnes en situation de handicap.

Des stages chaque année

Le Bac pro AEPA comprend 22 semaines de stage dans des structures de l’enfance et du grand âge. Ces périodes de formation professionnelle se répartissent sur les trois années : à Saint-Vincent de Paul, il y a deux fois trois semaines en seconde et en première puis six et quatre semaines en terminale. « Personnellement, en seconde, je privilégie toujours, puisqu’il n’y a pas d’obligation dans le référentiel, les structures en lien avec l’enfance. Je ne pense pas que les élèves soient prêts à cet âge à être confrontés au grand âge. En 2021-2022, durant l’un de ses stages en Ehpad, une élève de première a assisté au décès accidentel d’une personne âgée. Elle a été particulièrement affectée et a dû bénéficier d’un suivi psychologique. »

Des crayons de couleur à la tablette, les élèves utilisent tant les outils traditionnels que les supports numériques pour préparer leurs projets d’animation.

Particularité de taille, ce lycée est doté d’une section européenne. Elle permet aux élèves de bénéficier d’un enseignement complémentaire en langues vivantes (anglais ou espagnol) mais aussi de cours de discipline non linguistique (DNL) autour de la communication orale et écrite. Cette section donne par ailleurs aux élèves d’AEPA la possibilité d’effectuer un de leurs stages de première dans une structure à l’étranger. « Nous avons des partenaires en Irlande, en Espagne et très bientôt aux Pays-Bas. C’est une opportunité spécifique à notre établissement. » L’an passé, plus de la moitié de la classe de première a saisi cette chance.

Première promo en juin

« Pour tout projet d’animation, il faut un diagnostic. Je rappelle que vous êtes sur une épreuve du Bac ! » Le ton est sans équivoque, et les élèves de terminale ne pipent mot. Certains ont les yeux rivés sur leur téléphone portable qui leur donne un accès direct aux informations dont ils ont besoin pour rédiger la partie sur le contexte de leur diagnostic. D’autres demandent des précisions à l’enseignante. Les projets s’entremêlent et on parle à la fois du bal de fin d’année, leur grand projet d’animation dont le budget se monte à plusieurs milliers d’euros, et du « chef-d’œuvre ». « C’est une réalisation, collective ou individuelle, qui permet aux élèves d’exprimer des talents en lien avec leur futur métier, et de montrer et de valoriser leurs compétences ». Les jeunes adultes présenteront cette production disciplinaire à l’oral en mai.

Devant moi, se tient la « bientôt » première promotion du Bac pro AEPA. L’occasion rêvée de savoir à quoi ces jeunes se destinent : poursuivront-ils leurs études ? Envisagent-ils de directement travailler ? Etc. Les réponses se révèlent finalement plus variées qu’on aurait pu l’imaginer. Malick, comme plusieurs de ses camarades masculins et féminins, envisage de poursuivre ses études en passant un Bpjeps Activités physiques pour tous au Creps de Bordeaux. « Ce diplôme coûte cher, mais je connais déjà la structure qui m’accueillera en contrat d’apprentissage. C’est celle dans laquelle j’ai effectué mes derniers stages. » D’autres souhaitent rejoindre des filières plus générales tels le BTS ou l’université, comme Océane qui s’inscrira en fac de droit. Puis il y a des indécis, à l’image de Laura : « Je ne sais pas trop. Trois choix sont possibles : opter pour un DUT Carrières sociales, effectuer un stage à l’étranger de six mois… ou encore partir au Québec avec Erasmus. »

Les 29 élèves de cette promotion ont de vrais projets d’avenir, concrets et pragmatiques, qui les mèneront peut-être vers l’animation. Pourtant, en seconde, certains étaient arrivés dans cette spécialisation un peu par hasard : « Je n’avais pas le niveau pour faire prof’ de sport. », « J’étais sûre d’être prise car la spécialisation était nouvelle. », « J’aime les enfants, la conseillère d’orientation m’a dit que la formation me plairait. »

Les jeunes de cette première promotion du Bac pro AEPA ne deviendront peut-être pas tous animateurs, mais ils ont tous bâti durant ce cursus de vrais projets d’avenir.

Il faudra donc veiller à ce que la spécialisation qui permet d’acquérir de solides compétences professionnelles ne devienne pas celle où l’on place les jeunes dont on ne sait que faire. En trois années, le Bac pro AEPA a su se faire connaître et reconnaître, à tel point, comme le dit Agnès Befve, qu’une deuxième classe de seconde pourrait être créée dans le lycée. Les jeunes verraient-ils ainsi dans l’animation un vrai métier d’avenir ? C’est bon signe, non ?

Lycée des métiers Saint-Vincent-de-Paul  

47, rue des Sablières
33800 Bordeaux
Tél. 05 56 91 62 54
https://svpbordeaux.fr

Titre :
Bac pro AEPA : de la classe au terrain
Auteur :
Florent Contassot
Publication :
29 avril 2024
Source :
https://www.jdanimation.fr/node/195
Droits :
© Martin Média / Le Journal de l'Animation

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